Les fiancées de l'air
Caroline Aigle (1974 - 2007)
Le vol brisé
Caroline Aigle, qui fut la première femme pilote de chasse à être affectée au sein d’un escadron de combat de l'Armée de l'air française, vient d'être emportée par un cancer foudroyant à l'âge de 32 ans.
Une semaine après sa brusque disparition, le 21 août 2007, plus de 800 personnes, civils ou militaires, proches ou anonymes, ont écrit leur tristesse sur le blog créé par l'armée de l'air.
Crédits photo : AFP
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Sur le blog ci-dessus spécialement créé par le Service d'information et de relations publiques de l'armée de l'air, l'afflux de messages ne tarit pas. En une semaine, plus de 800 personnes, civils ou militaires, proches ou anonymes, y ont écrit leur tristesse, après la brusque disparition, le 21 août dernier, du commandant Caroline Aigle. Le 28 mai 1999, elle fut la première femme à devenir de pilote de combat dans l'armée de l'air française. Huit ans plus tard, une incroyable vague d'émotion parcourt le monde de l'aéronautique militaire et, au-delà, se propage sur la Toile où beaucoup, à l'instar d'Antoine, souhaitent aujourd'hui « bon vol à Caroline ».
Du jeune commandant Aigle, tout ou presque a été écrit au printemps 1999 lorsque, âgée de 24 ans, elle a reçu son brevet de pilote de chasse des mains du chef d'état-major de l'armée de l'air. À l'époque, la presse se passionne pour l'itinéraire de cette blonde, menue, au regard clair, issue de Polytechnique et formée à l'École de l'air de Salon-de-Provence. On apprend alors que cette native de Montauban est fille de médecin, fan de plongée sous-marine et de parachutisme, mais aussi qu'elle a été sacrée championne du monde militaire de triathlon par équipe deux ans plus tôt. Devant les journalistes, elle paraît réservée mais se plie de bonne grâce au jeu des questions pour balayer toute controverse, lâchant : « Je n'ai pas de problème en temps que femme ; dans ce domaine ce sont les capacités qui sont reconnues. »
Retournée au relatif anonymat des bases aériennes, Caroline Aigle poursuit ensuite un cursus classique, affectée comme pilote de Mirage 2000 à Dijon avant de prendre le commandement d'un escadron puis de rejoindre, en septembre 2006, la division « Sécurité des vols » au commandement des forces aériennes à Metz. « De toute évidence, elle avait en main toutes les cartes pour faire une très belle carrière », relève un officier.
«Sa motivation chevillée au corps»
Caroline Aigle, mariée à Christophe Deketelaere (pilote de la Patrouille Breitling de Dijon) et mère d'un enfant, Marc, apprend au cœur de l’Eté sa maladie alors qu'elle est enceinte du second. Contre l'avis des médecins qui lui conseillent de ne pas garder l'enfant pour préserver au mieux sa santé, elle choisit avec son époux de le garder. Gabriel naît ainsi par césarienne à cinq mois et demi, Caroline Aigle décédant quelques jours plus tard. Elle totalisait presque 1600 heures de vol.
Bouleversés, chaleureux ou admiratifs, de nombreux témoignages postés sur Internet traduisent depuis lors l'élan de sympathie peu commun que Caroline Aigle avait suscité dans
l'opinion - sans paraître l'avoir jamais cherché. L'une des onze femmes volant sur avion de chasse que compte aujourd'hui l'armée de l'air écrit : « J'étais toute petite lorsque j'ai entendu parler de vous en 2000 et j'étais déjà subjuguée par votre parcours. Maintenant que je fais partie de cette grande famille, je suis profondément touchée par votre disparition. » Lors de ses obsèques religieuses, le lieutenant-colonel Gilles Bertrand, qui fut son chef d'escadrille, a résumé le sentiment de ses pairs : « La communauté des gens de l'air s'incline très respectueusement devant toi, qui rentre aujourd'hui dans la légende. »
Outre ceux des pilotes et autres anciens du lycée du Prytanée de La Flèche, où elle fut élève, le blog regorge de témoignages plus personnels, tel celui d'une jeune femme anonyme qui se rappelle : « J'avais correspondu quelque temps avec elle pour qu'elle me fasse partager le rêve qui est le mien et qu'elle avait réalisé. Elle était très abordable. » Alex, lui, s'attriste : « Je pense surtout à ses enfants et à son conjoint, qui devront continuer leur route sans elle, et je leur souhaite beaucoup de courage. »
Comme de nombreux militaires, le général Stéphane Abrial, chef d'état-major de l'armée de l'air, était présent lundi à ses obsèques à Dijon, afin de« témoigner notre reconnaissance collective à cette femme exceptionnelle par sa force, sa motivation chevillée au corps, son charisme et son rayonnement ».
Postérité
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Caroline Aigle est décorée de la médaille de l'Aéronautique à titre posthume par le président de la République, le 2 octobre 2007
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Le 8 mars 2008, dans le cadre de la Journée internationale des droits de la femme, le musée de l'air et de l'espace, pour rendre hommage à Caroline Aigle, organise une journée d'hommage pendant laquelle, entre autres, une centaine de femmes pilotes se posent à l'aéroport du Bourget aux commandes de différents appareils, avec notamment des équipages féminins des trois armées et de la gendarmerie (Alpha Jet, Falcon 50, Eurocopter AS-350 Écureuil, Gazelle).
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Le centre nautique de l'École polytechnique porte aujourd'hui son nom. En outre, pour lui rendre hommage, les élèves de l'École polytechnique organisent chaque année le « triathlon Caroline-Aigle ».
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Une « avenue Caroline-Aigle » est inaugurée le 15 mai 2009 à Wasquehal (Nord), par le ministre de la Défense Hervé Morin.
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Un giratoire surmonté d'un hélicoptère, à l'entrée Nord de la ville de Montauban, porte désormais son nom. Lors de la cérémonie d'inauguration, sa mère s'est vue remettre la médaille de la ville de Montauban par la maire, Brigitte Barèges.
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Une rue proche de l’aéroport de Poitiers-Biard, et une autre à Dijon, honorent également sa mémoire.
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Les auditeurs de la 187e session régionale de l'Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN), qui s'est tenue à Montpellier, Toulon et Aix-en-Provence en novembre et décembre 2011, ont choisi à l'unanimité le nom de « Commandant-Caroline-Aigle » comme nom de leur promotion.
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Un groupe scolaire élémentaire, rue du Général-Lemaire à Verdun, porte le nom de Caroline Aigle depuis septembre 2012.
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Dans le quartier des aviateurs à Orly-ville, une allée Caroline-Aigle a été dénommée par le conseil municipal le 27 mai 2010 et une station du tramway T7 porte son nom.
Plaque de rue de Chambolle-Musigny, proche de la Base aérienne 102 Dijon-Longvic, en Côte d'Or.
Bibliographie
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Jean-Dominique Merchet, « Caroline Aigle : vol brisé », France, Éditions Jacob-Duvernet, 2007, 184 p.
(ISBN 978-2-84724-180-8)
Vidéos
La 1ère femme pilote de chasse de l'armée de l'air française
http://www.ina.fr/video/CAB99022586
Caroline AIGLE, a reçu le macaron officiel.
http://www.ina.fr/video/CAC99022667
Hommage à Caroline Aigle
http://www.youtube.com/watch?v=5WXcNfKMUF8
Sources :